Paul Cuttier : dessins et "Bignosus"
L'amour du trait, de la forme, du détail... l'observation d'une nature à la splendeur parfois inquiétante dans la vérité des corps sont les caractéristiques du travail de Paul Cuttier, dans son rendu à la fois précis et naïf .
A l'origine de ses engouements : les vieux ateliers qu'il a fréquentés à Lyon puis à Montpellier où les odeurs de vernis surchauffé, de résine et de térébenthine s' entremêlaient dans le fouillis des presses à gravure, bois, ou lithographie...
Le Noir et Blanc : taille-douce, plume, mine de plomb ou (aujourd'hui) feutre permanent ; c'est une constante dans son évolution qui a pourtant des prémices colorées. Ainsi, après avoir pratiqué l'huile sur toile et le pastel gras sur bois, il consacre une longue période aux crayons aquarellables sur bois, dont sont issus certains travaux présentés ici.
Les "Bignosus" mettent en scène une comédie humaine, Leurs appétits mis en jeux entre crainte et enthousiasme, dans une version de la vie naïve, voire coquine, légèrement bestiale, jamais dramatique... En résulte une chorégraphie souple et maniérée dont les sujets détournent la facture classique employée dans les compositions. Ses dessins ont pour décors un univers végétal et surtout minéral qu'il scrute depuis toujours avec émerveillement. Et si l'humanité a tendance à se raréfier dans sa cartographie picturale, c'est peut-être en miroir de sa vision de l'avenir.
L'art de Paul Cuttier, d'inspiration à la fois romantique et surréaliste, doit aussi beaucoup à la BD qui l'a accompagné dans ses pérégrinations artistiques et professionnelles multiples. Fervent admirateur des grands visionnaires (Bosch, Dürer, Doré, Friedrich, Trignac, Mohlitz, Cat, Ugarte, Giger... la liste est longue) mais aussi des auteurs de BD et de SF, il s'inscrit modestement dans cette lignée.
Ne cherchons pas une suite logique dans les dessins présentés : chacun est une œuvre intrinsèque. Il propose en un tableau l'amorce d'une fable où l'on peut à loisir cheminer au gré de son imagination, jusqu'au plus profond de l'espace... Mais nul doute qu'un bon psychiatre, tel le Petit Poucet, pourrait le suivre à la trace.